Ahmed Ben Bella, premier président de la jeune république algérienne, est mort le 11 avril 2012 à Alger. C’est sous sa présidence que sont promues des expériences autogestionnaires avec notamment les « décrets de mars 1963 ». dans lesquels on reconnaît les apports de Michel Raptis (Pablo) et du révolutionnaire algérien Mohamed Harbi. (Sur la photographie, meeting de soutien aux décrets à Alger en 1963). Comme le notent dans Le Monde du 12 avril Isabelle Mandraud avec Georges Marion : « En s’appuyant sur l’armée, qui devient un acteur central de la vie politique algérienne, Ben Bella concentre alors dans ses mains tous les pouvoirs : président de la République, secrétaire général du FLN, ministre de l’intérieur, des affaires étrangères… Il lance une réforme agraire qu’il promet « totale », nationalise à tour de bras le commerce et l’industrie, allant jusqu’à inaugurer lui-même une coopérative de teinturerie, et prône, sur les conseils du trotskiste Michel Pablo (de son vrai nom Michalis Raptis), l’autogestion ». C’est sous sa présidence qu’est adoptée en 1964 la « Charte d’Alger ».
Jouant sur un registre bonapartiste entre les factions et les clans, ses hésitations amènent à l’affaiblissement de sa position alors que la nouvelle bureaucratie et l’armée renforcent les leurs. Ecrivant un an après les décrets de mars un article (« L’autogestion en Algérie »), le rédacteur de Sous le drapeau du socialisme relève que «se crée à l’intérieur même de l’autogestion une couche bureaucratique ». On le trouve dans les extraits que nous avons rendus publics sur notre site https://autogestion.asso.fr/app/uploads/2011/09/autogestionalgerie.pdf. Le congrès des travailleurs de la terre de 1964 aussi a été « révélateur des ambiguïtés de Ben Bella, de ses volte-face. On va assister dans la presse à des offensives tous azimuts des tenants du conservatisme et des étatistes. Les socialistes autogestionnaires avaient en leur sein surtout des laïcs. Ils étaient accusés d’anti-arabisme, d’anti-islamisme et surtout d’athéisme. La campagne commençait donc contre la gauche. Et comme Ben Bella considérait l’Islam comme le ciment normatif de la société, il s’est montré plus sensible aux pressions de ses amis qui instrumentalisaient la religion, qu’aux intérêts du monde ouvrier dont il se réclamait en catimini » rapporte Mustapha Benfodil dans son article « Mohamed Harbi et les « volte-face » de Ben Bella » (Tamurt.info du 26 mai 2011). Renversé par le coup d’Etat de Boumedienne, Ben Bella est emprisonné en 1965. Malgré une campagne pour sa libération et celle des autres emprisonnés Il ne sera libéré qu’en 1979. Mohamed Harbi et Hocine Zaouane, alors en résidence surveillée, arrivent à quitter leurs surveillants et l’Algérie en 1973. A Rome, ils expliquent leur position.
Association Algérienne des Relations Internationales (119, Bd Didouch Mourad Alger centre)
La trahison
« Selon la voie morale islamique, la trahison et l’action qui mène à la destruction et à la perte de la société, à ce qui cause de difficiles problèmes pour les gens, à ce qui démolit la confiance des gens les uns et les autres. C’est une action qui peut conduire à détruire toute la Nation, lorsqu’elle se trouve dirigée pas des traitres » (Dieu n’aime ceux qui trahissent) (Coran VIII, 58).
Ahmed Ben Bella trahi par son homme de confiance.
.Le Coup d’État du 19 juin 1965 en Algérie que les putschistes, lui donnent le nom de « redressement révolutionnaire » ce putsch militaire animé par le colonel Houari Boumediene , alors de la Défense nationale de l’époque. A l’issue duquel le président de la République Ahmed Ben Bella a été renversé et par Boumediene et son clan, devient le colonel-président de l’Algérie de 1965 à 1978, jusqu’à sa mort cruelle..
L’Algérie devenue un État indépendant à l’issue du référendum populaire du 1er juillet 1962, le pays connaît immédiatement un conflit durant la crise de l’été 1962, qui oppose le GPRA, signataire des accords d’Évian et le « Bureau politique » formé par Ahmed Ben Bella qui a scellé un pacte avec le « clan d’Oujda » – à sa tête le colonel Houari Boumediene, chef d’État-major général de la fameuse « armée des frontières » planquée derrière les barbelés de la ligne Challe et Morice en territoire marocain. Ben Bella impose peu à peu son autorité sur ‘la guerre des clans’, notamment sur la rébellion Kabyle dirigé Hocine Ait Ahmed qui prône le partage du pays et cela avec l’appui militaire du colonel Boumediene. Il organise les élections à une Assemblée nationale constituante, en toute démocratie, le 20 septembre 1962, qui le désigne comme chef du premier gouvernement algérien. L’année suivante il devient le premier président de la République de l’Algérie indépendante, par le référendum du 15 septembre 1963 avec 5 085 103 voix.
Deux années plus tard, Ben Bella ne voit pas monter le danger. Discrètement, le colonel Boumediene tisse hypocritement sa toile, il est vice-président du gouvernement depuis 1963 et ministre de la Défense et donc chef de l’ANP, l’héritière de l’« armée des frontières » qu’il ne cesse de la renforcer et de l’équiper en faisant appel aux Soviétiques. À ce poste il dirige aussi la toute puissante Sécurité militaire, véritable police secrète à sa disposition, comme chef des armées. « Nous soutiendrons Ben Bella tant qu’il sera utile à l’Algérie. Le jour où il cessera de rendre service, il ne nous faudra pas plus de deux heures pour le renverser », aurait déclaré Boumediene à ses proches, avec hypocrisie.
N’osant pas s’attaquer directement au colonel Boumediene, Ben Bella cherche à réduire l’influence du « clan d’Oujda » au sein de son gouvernement. Il provoque la démission d’Ahmed Medeghri, ministre de l’Intérieur, puis pousse Kaïd Ahmed à renoncer au ministère du Tourisme. Et lors d’un remaniement ministériel en décembre 1964, il réduit considérablement les attributions de Chérif Belkacem un des membres du « clan d’Oujda », ministre de l’Orientation, qui a sous son autorité l’Information, l’Éducation nationale et la Jeunesse. Le président de la République, déjà chef du gouvernement et secrétaire général du FLN, s’attribue les portefeuilles de l’Intérieur, des Finances et de l’Information. Ben Bella rassemble sur son nom toutes les oppositions. Son ministre de la Santé, le docteur Mohmaed-Seghir Nekkache, le met en garde, sentant l’imminence du danger.
Le 28 mai 1965, alors que le colonel Boumediene représente l’Algérie à la conférence des chefs de gouvernement arabes au Caire, Ben Bella annonce qu’il retire à Abdelaziz Bouteflika, autre membre du « clan d’Oujda », son portefeuille de ministre des Affaires étrangères. Bouteflika alerte aussitôt son « patron », le colonel Boumediene. Ce dernier rentre aussitôt à Alger et il réunit ses compagnons du « clan d’Oujda » que viennent rejoindre les officiers Chaouia du « groupe de l’Est » dont (Tahar Zbiri, Saïd Abid, Ahmed Draia, Salah Soufi, Abdelaziz Zerdani). Tous sont pour le renversement de Ben Bella. L’opération est minutieusement préparée.
Coup d’État
La villa Joly, où réside le chef de l’État est située dans le même quartier où se trouve l’appartement du colonel Boumediene, à proximité de la Villa Arthur, où habite Bouteflika et non loin de l’état major de ANP où ont été mis au point les détails du complot. C’est au chef d’état-major de l’armée, le colonel Tahar Zbiri et la Sécurité militaire que le colonel Boumediene leur confie la tâche de mettre aux arrêts le président de la République.
Ben Bella est pris au saut du lit chez lui, le 19 juin 1965 à 2 h 30 du matin. Le colonel Zbiri accompagné de Ahmed Draia directeur de la Sûreté et Saïd Abid, commandant de la première région militaire du Grand Alger le réveille sans ménagement et le presse de s’habiller : « Au nom du Conseil de la Révolution, j’ai l’ordre de vous arrêter », lui lance t-il solennellement. Encadré par les trois officiers, le président monte dans une voiture noire qui l’amène vers une destination inconnue. Boumediene dans son quartier général, attend le rapport de ses hommes ; le téléphone sonne, au bout du fil, le colonel Zbiri : « Mission accomplie », dit-il.
À l’aube l’armée du colonel Houari Boumediene vient de prendre le pouvoir, les Algérois se réveillent avec des chars et des hommes en tenue de combat, postés à tous les points stratégiques de la capitale. Les émissions habituelles de Radio Alger sont remplacées par de la musique militaire et la diffusion de communiqués en boucle en arabe et en français. Le président déchu y est qualifié de « despote » et de « tyran ». À 12 h 05, dans un message radiodiffusé, le colonel Boumediene annonce la création d’un Conseil de la révolution qui assume tous les pouvoirs, jusqu’à sa mort cruelle ?
Ce coup d’État se produit à la veille du sommet afro-asiatique prévu à Alger, auquel le Premier ministre chinois Zhou Enlai et le président égyptien Nasser devaient participer, et au cours duquel le président Ben Bella devait apparaître comme l’un des principaux leaders du Tiers monde. Il intervient en outre quelques mois après l’accord secret entre Ben Bella et le FFS de Hocine Aït Ahmed qui était entré en dissidence dans son fief kabyle depuis 1963. Le colonel Boumediene, dont les troupes quadrillent depuis un an et demi les maquis de Kabylie, n’est pas favorable à ce rapprochement.
Du point de vue technique, le coup d’État a été mené de main de maître, sans difficultés ni bain de sang. La presse étrangère est interdite dès la veille du coup d’État, les communications téléphoniques sont coupées pendant quarante huit heures.
Chasse aux Ben Bellistes et aux gauchistes
Dès le lendemain du coup d’État, la chasse aux Ben Beylistes et aux opposants de gauche est lancée dans les ruelles de la capitale, à la fois massive et violente. Les camions de l’armée sillonnent les rues d’Alger, d’Oran, de Annaba et de Sidi-Bel-Abbès, les manifestants parcourent les rues aux cris de « Boumediene assassin », ils sont centaines de milliers environ. La radio passe en boucle des appels au calme et des menaces à l’encontre des manifestants. Plusieurs arrestations musclées, dont 50 Français d’extrême gauche partisans de Ben Bella. Puis à Constantine, les arrestations et les disparitions vont se multiplier au fil des semaines. À Annaba, plusieurs arrestations et plus d’une centaine de manifestants mitraillées sous les ordres de Boumediene. À Oran, les rues sont quadrillées par les automitrailleuses et les patrouilles militaires. Une manifestation spontanée composée en majorité d’étudiants se déroule Place d’Armes, et plusieurs d’entre eux sont arrêtés par la Sécurité militaire.
Le premier président de la République algérienne restera enfermé pendant quinze ans , dans des conditions inhumaines et ne sera libéré que le 30 octobre 1980 sous la présidence de Chadli Bendjedid. Il s’exile en Suisse. Il crée alors le Mouvement pour la démocratie en Algérie et se rapproche de Hocine Aït Ahmed. Il revient en Algérie le 27 septembre 1990. Il assiste à la prestation de serment du président Abdelaziz Bouteflika en 2009 et il prône la réconciliation avec les islamistes du Front islamique du salut (FIS). Une des raisons se son arrestation par le colonel Bouimédiène. Il mourra le 14/04/2012
– Texte préparé et écrit, pour le compte de l’Association des Amis de Ben Bella .