De son vrai nom Valdemar Nechtschein , Victor Leduc nait à Berlin en 1911 ,  dans une famille de juifs russes exilés à la suite de l’échec de la révolution de 1905.  En 1914 ils s’installent en France.

Boursier et interne Victor Leduc obtient le premier prix de français au concours général.   Par la lecture du Manifeste communiste, des ouvrages de Sorel et de Nietzsche il acquiert des bases théoriques et renforce ses convictions. En hypokhâgne au lycée Henri-IV, il adhère aux Jeunesses communistes et aux Jeunesses syndicalistes scolaires (lycéens du « pré-syndicat » Union fédérale des étudiants), puis au Parti communiste en février 1934. Il anime les Amis de l’URSS à Neufchâteau puis à Saint-Dié dans les Vosges où il enseigne.

Pendant la guerre, il rentre dans la résistance  et y rencontre Jean-Pierre Vernant, Lucie Aubrac, etc. Il s’occupe à plein temps de l’action clandestine à Toulouse. Arrêté et évadé, il continue son activité à Paris. Responsable de l’action ouvrière du MLN qui éditait le journal clandestin Action il en devient le directeur à la Libération, jusqu’en octobre 1949, moment où la direction du PCF le remplace. Ensuite il devient responsable de la revue internationale du Mouvement de la paix, permanent à la section idéologique, et à la commission des Intellectuels,  écrit dans différentes revues communistes : Cahiers du Communisme, Démocratie nouvelle, la Nouvelle critique et quelquefois dans la rubrique « Doctrine et Histoire » de l’Humanité. En 1954, lors du XIIIe congrès, dans une tribune de l’Humanité, il propose la modification de la résolution générale sur le problème de l’indépendance nationale, Aragon parle au congrès de « déviation trotskyste ».

De la dissidence…

Avec le rapport Kroutchev il passe dans l’opposition ouverte. Il est évincé de ses diverses responsabilités, et organise la protestation après les événements de Pologne et de Hongrie en 1956. La même année il participe au comité des intellectuels  contre la guerre d’Algérie. Il crée un journal clandestin, l’Etincelle. Il est membre du SNES est élu à la commission administrative de la section académique de Paris

En mai 1968, Victor Leduc fit partie des trente intellectuels communistes qui adressèrent au Bureau politique une protestation contre la politique du parti à l’égard des étudiants. Sa signature, en 1970, sur un texte public demandant l’ouverture d’un débat après les exclusions de Roger Garaudy et Charles Tillon provoque son exclusion du Parti communiste en octobre 1970.

… à l’autogestion

L’année suivante, Victor Leduc est parmi les créateurs, des CIC (Centres d’initiative communiste)  et animateur du CLAS (Comité de liaison pour l’autogestion), dont il rédige les « 14 thèses pour l’autogestion ».

Avec les CIC il rejoint le PSU en 1973 et en devient membre de la Direction politique nationale  puis du Secrétariat national du parti. Hostile à la participation du PSU au gouvernement de gauche en 1981, Victor Leduc devient président d’honneur de l’Alternative pour la démocratie et le socialisme (ADS) dans les années 1990.

Dans le Maitron (dictionnaire biographique du mouvement social), Claude Pennetier note « Petit, trapu, cet « idéologue », militant infatigable, était une silhouette familière des réunions des courants autogestionnaire, alternatif et communiste critique. Il fut signataire du manifeste « Refondations » au début des années 1990 ».

Parallèlement à son activité politique, Victor Leduc a créé, dans le cadre de l’Union rationaliste, en 1966, avec des intellectuels pour la plupart membres ou anciens membres du PCF, une revue se réclamant à la fois du rationalisme et du marxisme : Raison présente.

En 1989, il publie aux Editions La Brèche Alienation ou autogestion. Le dilemme de notre temps. Ce sont vingt années de débats philosophiques et politiques que retrace le livre qui se présente sous la forme d’un recueil commenté de textes centrés, pour l’essentiel, autour du concept d’aliénation.  Le Monde diplomatique note alors « Outre l’intérêt proprement historique du point de vue de l’évolution d’une problématique marxiste dénuée de tout dogmatisme, Aliénation ou autogestion présente l’immense mérite de tenter une analyse particulièrement intelligente et actuelle du fonctionnement des sociétés capitalistes et socialistes, et des pratiques politiques et sociales qui y ont cours  La nature et l’ampleur des récents changements à l’Est permettent d’apprécier la pertinence des analyses de Victor Leduc, en même temps qu’elles appellent à les poursuivre, notamment dans le domaine économique.».

A son décès en 1993, Arnaud Spire écrit dans L’Humanité du 4 décembre 1993 : « devenu secrétaire national [du PSU], il reproche à sa formation, et à Michel Rocard, d’avoir substitué au « projet autogestionnaire » l’idée d’un « socialisme de responsables ». Jusqu’au bout, il s’est efforcé de concilier, par la pensée, l’autogestion et une certaine conception de « l’alternance tranquille ».

 

Pour aller plus loin :

 

Claude Pennetier, « Leduc Victor », Dictionnaire biographique du mouvement social, Ed. L’Atelier.

Victor Leduc, Les Tribulations d’un idéologue, préface de Pierre Vidal-Naquet, Editions Syros, 1986.

Les archives Victor Leduc sont consultables à la BDIC de Nanterre, sous la cote F delta rés. 761 (1)(3). Voir l’inventaire : http://www.bdic.fr/pdf/FONDS%20VICTOR%20LEDUC.pdf