Associations ouvrières de production.

Elles avaient pour but de substituer à la méthode traditionnelle de production, effectuée au bénéfice d’un patron, des associations d’ouvriers appartenant aux mêmes corps de métier et vendant directement, et pour leur compte, leur production. L’ouvrier devenait ainsi propriétaire de son travail et une partie des bénéfices réalisés devait servir à financer d’autres associations. Ce système, assez florissant vers la fin de l’Empire, avait dépéri avec la guerre et le Siège, mais il a répandu les idées de fédération et certainement facilité l’organisation de la Fédération de la Garde nationale. La Commune aurait aimé l’amplifier, car il offrait les bases d’une réforme sociale. Bertin, secrétaire de la commission du Travail, de l’Industrie et de l’Échange, fit un recensement des associations ouvrières de production existantes et le publia le 14 mai. Il y en avait quarante-deux: Facteurs d’anches, Bijoutiers en doré, Facteurs de cannes et manches de parapluie, Facteurs de chaises, Charpentiers, Chaudronniers, Cloutiers, Cordonniers-coupeurs, Cordonniers-bottiers, Doreurs et Argenteurs sur métaux, Facteurs de piano, Ferblantiers, Formiers, Fumistes, Graveurs sur bois, Facteurs d’instruments de musique, Lanterniers, Lanterniers pour voitures, Lithographes, Lunettiers, Maçons, Mégissiers, Menuisiers en bâtiment, Menuisiers en voitures, Facteurs de meubles sculptés, Opticiens, Papetiers, Passementiers, Peintres en bâtiment, Peintres en voitures, Plombiers-Couvreurs-Zingueurs, Polisseurs d’acier, Robinetiers, Sculpteurs, Serruriers, Société des matières premières pour ébénisterie, Tailleurs d’habits, Tailleurs de limes, Tonneliers, Tourneurs d’essieux, Typographes, Vanniers.


Ateliers coopératifs.

Le 3 mai, l’Union des Femmes pour la Défense de Paris et les soins aux blessés remet à Frankel une pétition: « Il nous faut du travail puisque nos frères, nos maris, nos fils ne peuvent subvenir aux besoins de la famille… ». Le 6 mai, au Conseil de la Commune, Frankel propose l’organisation d’ateliers qui fourniraient, aux femmes, du travail à domicile. Mise au courant de ce projet, l’Union des Femmes demande à en élaborer la réalisation. Ses comités de quartier entreprennent de recenser toutes les chômeuses, métier par métier, et tous les ateliers laissés vides par le départ de leurs propriétaires pour Versailles ou pour la province. Une commission centralise les renseignements et rédige un rapport. Idéologiquement, « le point essentiel, celui qu’il faut atteindre, est de faciliter la naissance de groupements sérieux et homogènes, de présider à leur formation et, tout en les laissant libres et autonomes, de leur donner l’esprit de la Fédération » ; pratiquement, « il s’agit de confectionner des objets marchands, ayant une valeur courante et qui peuvent s’écouler facilement ». Les premiers ateliers durent ouvrir vers la mi-mai : ils ne rassemblaient pas des femmes affectées à une tâche en fonction de leur métier, mais centralisaient des commandes et distribuaient le travail aux ouvrières, qui l’exécutaient à domicile. L’ouvrage terminé, les ouvrières l’apportaient à l’atelier, qui en assurait la livraison. Ce système donnait satisfaction aux préjugés de l’époque contre le travail collectif des femmes et défendait leurs intérêts en évitant que leur salaire ne soit amputé des bénéfices d’un intermédiaire. Étant donné les circonstances, les ateliers coopératifs ne reçurent guère que des commandes de la Commune, et essentiellement de sacs destinés à être remplis de sable ou de terre pour le renforcement des barricades. On ne sait au juste combien en furent ouverts dans Paris, car la Semaine sanglante mit presque aussitôt un terme à ce qui promettait d’être une des initiatives les plus originales de la Commune dans le domaine social.