Du 22 au 27 mai 1968, les footballeurs occupaient la FFF (Fédération française de football) et accrochaient une banderolle à la fenêtre : « Le football aux footballeurs », et diffusaient un texte eponyme distribué en tract.
Qu’en est-il aujourd’hui ? Une des actualités auxquelles on ne peut échapper même si on le voulait c’est la coupe du monde de football. Le foot est mis en scène comme sport de compétition, aux enjeux financiers d’importance, les clubs comme les joueurs étant vendus, achetés, marchandise comme une autre. C’est pourtant un sport populaire, pratiqué massivement car demandant un faible investissement, joué sur des terrains vagues, de larges trottoirs. Là aussi, la domination du capital et de la financiarisation n’est pas irrésistible. Dans les clubs « amateurs » certes, et jusqu’au sein même des grandes équipes, comme de grands clubs, ça branle dans le manche. Là, comme ailleurs, il peut devenir insupportable de subir les changements de propriétaires, qui décident eux-mêmes de la désignation des entraîneurs, choisissant eux-mêmes les joueurs sans en informer, encore moins consulter, les supporters, les joueurs.
En 2007, ce sont les dirigeants du FC qui, « s’en remettant à l’autogestion des joueurs », selon les termes employés par le directeur sportif Txiki Begiristain lors d’une conférence de presse, suite à la demande de l’entraîneur Frank Rijkaard qui avait demandé qu’il n’y ait pas de sanctions « parce qu’il a confiance dans l’autogestion du groupe ». Peut-on dire qu’en 2013 c’en est fini de cette autogestion? En tous cas, avec le Real Madrid, l’Athletic Bilbao et le Club Osasuna, le FC Barcelone fait partie de ces quatre clubs qui ont refusé de suivre l’obligation de se transformer en sociétés commerciales comme l’avait imposé à la fin des années 1990 le gouvernement socialiste de Felipe Gonzales ainsi que le rappelle Le Monde diplomatique de juin 2014.
A Genève, des « prises de pouvoir » par des joueurs ou des membres des clubs qui en deviennent entraîneurs ou présidents amène à un rajeunissement.
En 2009, les décisions de la Fédération française de football qui avait décidé de plusieurs matches, dont un France-Espagne contre l’avis des joueurs, était mise en cause. Lors d’un stage à Tignes, Evra, très représentatif de la plupart de ses coéquipiers, avait ainsi protesté contre le fait que le successeur de Domenech ait été choisi avant ce mondial. C’est dans ces conditions que Le Figaro avait pu titrer un article « Les Bleus en autogestion » lors de la coupe du monde en Afrique du sud en 2010, quand le public apprenait que Les Bleus « ne voulaient plus de Robert Duverne et de son staff à la suite d’une l’altercation avec le capitaine », Patrice Evra, tenant réunion dans leur bus, au bord du terrain d’entraînement.
Un modèle est sans aucun doute le club FC Sankt Pauli situé dans un quartier populaire de Hambourg. Loin du modèle « traditionnel » de clubs machistes, et loin du « foot business », le FC Sankt Pauli est dirigé par un homme de théâtre homosexuel, selon ses statuts mêmes il s’affirme comme club antiraciste antifasciste, et les militants de gauche et d’extrême gauche qui y sont liés assurent leur présence dans les tribunes, y faisant vivre une culture populaire, antifasciste avec chants et banderoles.
On ne peut évidemment, alors que la coupe 2014 s’y déroule, le Brésil avec Socrates. Le Sport Club Corinthians Paulista est l’un des plus grands clubs de Sao Paulo. En accord avec le directeur sportif de l’équipe, Atilson Monteiro Alves, Socrates et ses coéquipiers inventent une démocratie participative : toutes les grandes décisions stratégiques du club seront mises au vote. La « Démocratie Corinthienne », est née.