En une période où les mencheviks et les sociaux démocrates disparaissent peu à peu du monde politique, et au moment où la plupart des penseurs et idéologues pédalent dans la choucroute, un petit livre rouge intitulé « Octobre 1917-2017, d’un communisme décolonial à la démocratie des communs » vient de paraître et va probablement s’imposer non pas comme une bombe mais plutôt comme un détonateur…
Car les 163 pages de cet ouvrage, écrit par une brillante économiste dans un style nerveux, direct, sans fioritures, sont exactement l’inventaire indispensable au grand débat d’idées, inévitable, pour un risorgimento de la gauche.
Organisé en deux parties (« De la révolution d’Octobre à la Stalinisation » + « La poursuite de la révolution permanente après Staline, dans un siècle brouillé » et « Du grand débat cubain à un système autogestionnaire ») Catherine Samary* 1 n’élude aucune question difficile, reconnaît toutes les erreurs du socialisme soviétique et, surtout, elle met l’accent sur l’excommunication des communistes yougoslaves par Staline en 1948, ces « infâmes titistes » qui avaient osé introduire l’autogestion dans un système corseté par la planification de l’État bolchevik.
L’autogestion yougoslave revendiquée par la jeunesse serbe contre la « bourgeoisie rouge » de la bureaucratie stalinienne, est probablement l’événement prémonitoire de la faillite du communisme soviétique, la goutte de poison qui a fait vaciller puis basculer tout un monde communiste qui était pourtant conçu pour être celui de la justice sociale, de l’égalité et de la fraternité pacifique universelle.
Mais en dénonçant la trahison de Tito, Staline a trahi l’esprit de la Commune de Paris dont il se réclamait notamment en recevant au Kremlin, Adrien Lejeune, l’un des derniers Fédérés, un survivant de la barricade Ramponneau.
En effet, ce « petit livre rouge » vient remettre les pendules à l’heure car le communisme yougoslave ressemble beaucoup au socialisme libertaire des Communeux. Il fait donc référence à L’État et la Révolution d’Arthur Arnould plutôt qu’au livre de Lénine qui porte le même titre.
« Les 72 Immortelles » ou « la fraternité sans rivages », c’est à dire l’examen avec les bésicles de l’École des Annales, des 72 jours et des 72 nuits de la Commune de Paris, vont apporter au travail pertinent de Catherine Samary, le substrat historique qui en justifie le discours. Mais c’est le deuxième volume des » 72 Immortelles » intitulé « l’ébauche d’un ordre libertaire », qui en validera la prospective.
Ces ouvrages sont publiés par une maison d’édition indépendante et coopérative 2.
Article original : https://blogs.mediapart.fr/vingtras/blog/060318/le-petit-livre-rouge-de-catherine-samary
Notes:
- Elle est titulaire d’un blog sur Mediapart. ↩
- Les éditions du Croquant, 20 route d’Héricy 77870 Vulaines-sur-Seine. ↩