Le droit social part en fumée et François Hollande s’apprête à en consommer les dernières brindilles avec l’ANI. Que reste-t-il de la démocratie municipale ? Pas grand chose rien mais l’illusion est quasi parfaite. A un an des municipales, les manœuvres ont largement commencé. Pourtant, les carottes sont cuites avec la loi dite de la « réforme des collectivités locales » (RCT) entrée en vigueur le 1er janvier.
Elle transforme profondément toutes les structures territoriales et, en particulier, les pouvoirs des conseils municipaux dont il ne reste plus grand-chose. Le gouvernement a déposé deux projets : un projet sur les modalités d’élection des conseillers généraux, régionaux, municipaux et intercommunaux, présenté par Manuel Valls, et un projet de décentralisation présenté par Marylise Lebranchu. Ces lois sont en discussion au parlement. Il reste les communes.
Avec la RCT, elles ont l’obligation de se regrouper en « Établissements Publics de Coopération Intercommunales » (EPCI) d’un minimum de 5 000 habitants qui prend en charge la quasi-totalité des pouvoirs assurés par les municipalités jusque maintenant. Les syndicats de moyens sont intégrés d’office dans ces nouvelles structures. La RCT est lourde de conséquences et parfois inapplicable dans le monde rural. Idem dans les gros bourgs, les petites villes et les villes moyennes. Les communes déjà fragilisées par la suppression de la taxe professionnelle se retrouvent pratiquement sans capacité de décisions par cette organisation. Curieusement la compétence générale leur est maintenue mais… sans moyens et sans grandes ressources.
Les candidats fléchés.
Pour les communes de plus de 500 habitants, les conseillers municipaux seront élus dans le cadre d’un scrutin de liste et, parmi eux, les candidats fléchés seront ceux qui se présentent afin de participer à la gestion de l’EPCI. Pour les communes inférieures à 500 habitants, ce seront les conseils municipaux qui désigneront leurs représentants. Dans ces conditions, ces petites communes rurales à l’agonie seront « invitées » à fusionner dans de « nouvelles communes ». Un exemple rural : dans l’Aude, il y a 356 457 habitants en 2010, 438 communes, 35 cantons, 3 députés, 2 sénateurs et 11 EPCI prévues. Fini « cloche merle », bonjour le préfet.
Pour les grandes villes, deux structures particulières d’EPCI sont créées :
- Les « métropoles » : Unités de plus de 500 000 habitants. Elles bénéficieront de transferts de compétence et de dotations de l’État, actuellement dévolue aux départements et régions. Ce sont les grandes gagnantes de cette réforme.
- Les « pôles métropolitains » : Ils sont organisés autour d’une ville formant une EPCI de plus de 150 000 habitants de façon à réunir un ensemble de 300 000 habitants. Autant dire que les communes environnant la grande ville seront à sa merci…
La réforme vise à renforcer le contrôle de l’État
Ces transformations, contrairement aux déclarations, ne visent pas à une « rationalisation » de la décentralisation mais au contraire à renforcer le contrôle par l’État des décisions territoriales et à éloigner les citoyens des structures de décisions.
Du vrai Canada Dry : il reste des communes, des municipalités, des conseillers municipaux et des maires mais pratiquement sans moyens et donc sans capacités de décisions. Juste le droit d’écouter les citoyens protester sans pouvoir rien faire. La question des ressources municipales est complètement passée sous silence.
Un pan entier de la « nomenklatura » municipale disparaît. Les citoyens se retrouveront face à des EPCI désignés (par les flèches) hors du suffrage électoral. Une nouvelle bureaucratie entièrement sous contrôle des partis et de l’État voit le jour. Elle sera encore plus sensible aux sollicitations non seulement du gouvernement mais aussi des groupes industriels et financiers. Ce qui n’est pas pour déplaire aux PS qui déclare à qui veut l’entendre que c’est Sarkozy qui à fait voter cette loi, ce qui est vrai. Un vrai tour de magie : « c’est pas moi c’est les autres ». On est loin de la démocratie participative et de l’autogestion. On est loin de la démocratie tout court.
Une réforme des collectivités territoriales pour être utile devrait être articulée dans l’esprit de coopération/solidarité et être conduite avec la participation citoyenne. Elle doit être encouragée et perfectionnée, cela s’appelle la démocratie. Celle-ci peut être plus au moins élaborée et il faut la faire progresser en allant plus loin que la simple démocratie représentative destinée à mettre en place des notables. C’est un long chemin à parcourir dans les régions marquées par le clientélisme.
Une réforme, pour qu’elle soit démocratique, devrait être le contraire de celle imposée par la RCT où l’État dicte ses choix et donne des impératifs de temps à une administration aux ordres.