Pas de quoi en faire un scoop et pourtant c’est un petit et grand événement pour Castelnaudary. Depuis deux semaines, nous avons une Nuit Debout. Même une fois par semaine, soyons modestes, c’est un événement qui permet de mesurer l’impact qu’a pris Nuit Debout dans la vie sociale et politique française.
Le contexte
Castelnaudary est un gros bourg, à peine une petite ville, de moins de 13 000 habitants, située dans le Lauragais, c’est-à-dire dans l’Aude, entre Toulouse et Narbonne et à mi-chemin de Carcassonne, beaucoup plus connue et qui a aussi une « Nuit Debout ».
Comme beaucoup de villes du Midi, on y trouve un boulevard bordé de platanes. Parfois, il y fait chaud. Mais il y a aussi le centre de formation de la Légion étrangère, ce qui amène les bérets verts dans la ville les samedis, jours de permission. En dehors de cela, on y trouve, dans le désordre, une autoroute, une gare, un théâtre, un cinéma tout neuf, deux grands lycées, plusieurs collèges et écoles primaires, deux centres commerciaux et une bonne centaine de commerces fermés, ce qui commence à se voir, comme si la ville avait perdu ses plumes. N’oublions pas la montagne à deux heures et la Méditerranée très proche aussi.
Pas de grandes usines mais quelques activités agro-alimentaires marquantes en lien avec le cassoulet. Il y a quatre ans, la ville fut secouée par le scandale de l’usine Spanghero et son «cassoulet de cheval». La presse est venue, l’usine et l’abattoir ont fermé et la presse est vite repartie. L’usine a redémarré, laissant plusieurs centaines de chômeurs sur le carreau. L’abattoir n’est plus là.
La mairie et l’Éducation nationale sont les premiers employeurs de la ville et le Parti socialiste, comme dans tout le département et la région, est puissant, même si les élections peuvent parfois changer très légèrement le paysage.
Comment ça se passe?
Dans le journal, très important le journal, une photo paraît en présentant Nuit Debout à Castelnaudary avec environ 20 participants. Prochaine Nuit, le vendredi suivant. J’y suis allé. En tout, 18 participants. Ils sont arrivés petit à petit : un tiers de jeunes, un tiers d’adultes et un tiers de retraités. Finalement, quelque chose de représentatif de ce que l’on trouve ici, à Castelnaudary.
L’initiatrice de Nuit Debout a entamé le débat par une présentation de la situation. Pour dire les choses, j’ai entendu de nombreuses idées et concepts qui ne s’imposaient pas, mais peu importe. Ce qui comptait était la motivation qui amenait cette petite vingtaine de citoyens à se réunir et à parler. Je ne dirais pas discuter car finalement peu d’interventions visaient à présenter un projet sur lequel on pouvait échanger ou même se contredire ; il s’agissait en réalité de raconter sa douleur de vivre dans cette société si aliénée et chacun-e a exprimé à sa manière le sentiment de perdre le contrôle de sa vie particulière et de la vie en général.
Pour résumer, le fond du discours de chacun-e, avec ses mots et son vocabulaire très différents de l’un-e à l’autre, était le suivant : «Ils nous bouffent la laine sur le dos et il nous en reste de moins en moins pour nous réchauffer».
Évidemment, je caricature un peu mais pas tellement. Une sorte d’envie de révolution qui ne sait pas encore dire son nom. Ce qui me frappe aussi, c’est qu’on a peu entendu de propositions permettant de s’unifier et de combattre. Et combattre quoi au fait ? J’ai juste rappelé, mais je n’étais pas le seul, que la loi El Khomri visait à nous faire reculer sur l’ensemble des acquis sociaux depuis 1936, la Libération, Mai 68, etc. Cette très courte intervention a semblé permettre de revenir un peu sur une préoccupation commune.
Prochaine réunion dans une semaine au même endroit.