Il en aura fallu du temps pour introduire un peu de « démocratie participative » à Paris. Plus exactement treize ans après la prise du pouvoir municipal par la gauche dans la capitale. Mieux vaut tard que jamais, même si l’on est encore loin du compte puisqu’il s’agit d’une consultation plus que d’une véritable prise d’initiative par les habitants.
Des associations avaient commencé à émettre des propositions mais la mairie a considéré qu’il était trop tôt (ou trop tard) pour cela et c’est donc quinze projets élaborés par l’administration municipale qui sont soumis aux habitants . Ces derniers sont invités à en choisir cinq. Les projets qui auront recueilli le plus de voix seront mis en place dans la limite du budget alloué de 20 millions d’€uros (par exemple 2 projets à 10 millions, 4 à 5 millions, etc…).
Les limites sont évidentes. Mais le constater – et les contester – ne suffit pas. Aspect positif des choses, tous les habitants votent sans conditions ni d’âge, ni de nationalité. (L’audace voudrait qu’ils votent également au moins aux élections locales conformément aux promesses électorales…). Le vote est un vote papier – avec urnes dans les mairies – ou internet, le scrutin est ouvert pendant une semaine du 24 septembre au 1er octobre.
Nous sommes loin du vœu affiché par Hidalgo, « Je souhaite donner les clés du budget aux Parisiens ».(Cela rappelle le « mon objectif, vous rendre le pouvoir » de la campagne de François Mitterand avant 1981). Pour l’instant, les habitants de Paris n’ont ni les clés, ni la serrure. Ce processus plus référendaire que participatif permet simplement d’être (un peu) entendus quand on frappe à la porte.
Toutefois, l’engagement pris pour la suite de la mandature mérite d’être repris au bond. Dans les cinq prochaines années, c’est 5% du budget d’investissement (soit entre 70 et 75 millions d’Euros par an) qui seront accordés à des projets élaborés par, ou avec, les habitants. Dans d’autres pays, d’autres villes comme Toronto au Canada, Chengdu en Chine, et bien sur Porto Alegre la pionnière, ce n’est pas 5% mais 20% du budget .
Comment passer d’une logique plébiscitaire à de véritables choix collectifs partant des habitants ? Comment éviter la concurrence entre différentes associations ou groupes de citoyennes et citoyens ayant chacun « son » projet à faire passer devant les autres. Il n’est pas impossible que profitant de l’occasion se rencontrent les associations, les groupes d’habitants, y compris les syndicats puisque ceux qui travaillent à Paris, a fortiori dans ses services publics, sont concernés. Quel qu’en soient les limites quant à leur constitution et leur fonctionnement, existent aussi des conseils de quartier, des CICA qu’il faut investir. Un pari pour Paris, pourquoi tout cela ne convergerait-il pas pour préparer dores et déjà la prochaine échéance de 2015 ? Car outre les choix des projets, l’enjeu est d’étendre les prérogatives en quantité (pourquoi se limiter à 5% du budget?) et en qualité (comment contrôler, et orienter les budgets des services publics parisiens vers les besoins définis par les habitants avec d’autres critères que ceux étriqués de la « bonne gestion » administrative).
Participer à ce premier pas, jouer le jeu, oui. Mais c’est pour dire chiche! Alors que que se tient ce week-end à Paris le festival des utopies concrètes, en voilà une d’utopie concrète : relever le défi en jouant le jeu, ce afin de changer les règles du jeu au profit d’une dynamique démocratique, bref d’une « gymnastique autogestionnaire ».