Après avoir abandonné l’usine VioMe et ses travailleurs, les laissant sans salaire depuis quatre ans, voilà que les anciens propriétaires se manifestent pour reprendre le contrôle de l’entreprise. Une décision de justice vient d’être rendue qui invalide la totalité des demandes des anciens propriétaires et ouvre peut-être la voie à une légalisation définitive de la coopérative.
Depuis quatre années, les travailleurs de VioMe ont occupé l’usine et ont relancé en autogestion la production. Alors que l’entreprise réalisait antérieurement des colles et dissolvants pour le bâtiment, ses travailleurs décident de se lancer dans des produits nettoyants ménagers à base de composants exclusivement naturels. Depuis, les travailleurs se battent pour la légalisation de leur coopérative, légalisation qui a jusqu’à présent été refusée par l’administration pour cause d’occupation « illégale » des lieux.
Le 8 juillet 2014, le tribunal de Thessalonique devait se prononcer sur une demande du liquidateur de Filgeram Johnson permettant aux anciens propriétaires de l’entreprise, la famille Fillipou, de reprendre le contrôle de Vio.Me. Nous publions ci-dessous le communiqué de presse de l’« Initiative ouverte de solidarité avec les travailleurs de VioMe » qui a été diffusé à cette occasion.
Le jugement a été rendu ces derniers jours. Le liquidateur a été débouté de sa demande et la famille Filipou n’a pu reprendre le contrôle de l’usine. Le Tribunal a nommé une administration provisoire de trois membres, dont un représentant des travailleurs de VioMe et deux autres experts auprès des tribunaux. Selon les travailleurs de VioMe, « le plus important est que les obligations de l’Administration provisoire comportent un contrôle financier et la réorganisation de l’entreprise VioMe ». Ils notent qu’« il est ainsi reconnu, à mot couvert, que les meilleurs candidats pour garantir la pérennité de l’usine, sont les travailleurs eux-mêmes ». Voilà une décision qui marque une étape importante dans la reconnaissance légale de VioMe, reconnaissance qui lui permettra de développer une stratégie commerciale de long terme.
Communiqué de presse sur le procès autour de l’avenir de VioMe
Thessalonique, le 8 juillet 2014
Avec des dizaines de personnes rassemblées, à l’extérieur comme à l’intérieur du Tribunal, les auditions relatives à la demande du liquidateur de Filgeram-Johnson ont débuté aujourd’hui. Le liquidateur a demandé que la famille Filipou participe à l’adminsitration de VioMe à titre provisoire. La famille Filipou sont ceux qui ont abandonné l’usine et ses travailleurs, leur devant des millions d’euros d’arriérés de salaires et qui ont été condamnés à plusieurs années de prison au titre de leurs dettes.
Depuis 9 heures ce matin, la foule qui s’est rassemblée en solidarité a envahi les environs immédiats du tribunal de Thessalonique, montrant ainsi son soutien à la lutte des travailleurs et de leur syndicat. En plus des travailleurs, des chômeurs, des syndicalistes et différents collectifs, une heureuse surprise est venue de la présence d’une délégation de la jeunesse du Parti socialiste autrichien, qui visitait la Grèce et a décidé de montrer ainsi son soutien à la lutte.
Concernant le procès, le liquidateur, A. Semerdgidou, après avoir demandé que soit rejeté une participation aux auditions des travailleurs de VioMe du fait qu’ils n’auraient aucun « intérêt légal » , est resté ferme sur sa position et a constamment défendu la proposition outrancière d’un retour de l’usine aux précédents patrons. « Avec eux en tant qu’administrateurs, VioMe produisait des produits commerciaux de qualité » disait-elle, comme si les quatre dernières années n’avaient jamais existé.
Du côté des travailleurs, le représentant du syndicat de VioMe, tout comme le second témoin, G. Papakonstantinou, ont défendu le droit des travailleurs de reprendre l’usine et de la faire fonctionner eux-mêmes, et de faire tout ce qu’ils peuvent pour éviter une faillite de VioMe, qui précipiterait leur expulsion de l’entreprise et l’annulation de leur demande à l’égard de l’administration.
Makis Anagnostou, représentant des travailleurs, a tout particulièrement déconstruit les arguments de l’administration – que leurs avocats ont constamment développé – démontrant ainsi, chiffres à l’appui, que la tactique de la famille Filipou avait pour objectif la fermeture de l’usine. Il a parlé des possibilités et des perspectives qui s’offraient aux travailleurs malgré l’indifférence montrée par l’administration, et a défendu que les machines n’étaient pas à l’abandon, contrairement à ce que l’avocat indiquait, mais en parfaite condition de fonctionnement grâce à la présence du syndicat dans l’usine.
La mauvaise foi était évidente lorsqu’un avocat des « ex-travailleurs de VioMe » s’est présenté et a défendu sous serment que « l’occupation de l’usine n’était le fait que de quatre personnes », assertion qui lui a valu la risée de la foule présente dans la salle. Ce même avocat a même indiqué qu’il connaissait parfaitement la famille Filipou et qu’« elle aiderait à la réouverture de l’usine » , déclaration qui a été prise au mieux comme une mauvaise plaisanterie y compris pour ceux qui n’ont suivi cette affaire que de loin.
D’ailleurs, aucun des « ex-travailleurs » qui auraient pris le parti du patron n’est apparu au tribunal, pas plus d’ailleurs qu’un quelconque membre de la famille Filipou. Nous supposons qu’ils ne l’ont pas fait car ils n’avaient pas le courage de rencontrer les travailleurs de VioMe et leurs familles (qui soutiennent la lutte depuis plusieurs années) et de les regarder dans les yeux. Même s’ils avaient honte d’apparaître, cela ne les a pas empêché d’avoir l’outrecuidance de laisser leurs avocats faire le « sale boulot » sans aucune honte.
En conclusion, nous tenons à remercier les centaines de chômeurs, de travailleurs, de collectifs et de groupes qui ont, une fois de plus, soutenu la lutte, en se rassemblant autour du tribunal de Thessalonique, de même que ceux qui ont organisé aujourd’hui une manifestation au Ministère du travail, hier, en Crète ou à Sparte ainsi que les camarades d’Italie qui se sont rassemblés la semaine dernière à l’Ambassade de Grèce. Nous sommes confiants que la décision du Tribunal qui sera rendue dans les semaines à venir, ne sera pas un nouvel obstacle à la lutte juste et exemplaire des travailleurs. Quoiqu’il en soit, le mouvement de solidarité qui s’est manifesté aujourd’hui nous renforce dans notre détermination à faire tout ce que nous pouvons pour que cette lutte ne recule pas.
L’autogestion des travailleurs de VioMe est là pour durer.
Initiative ouverte de solidarité avec les travailleurs de VioMe.