Quelque soit son origine, le virus et la pandémie sont bien réels. Il convient de rappeler qu’il y a des morts, mais aussi – on aimerait en avoir des chiffres – les « Covid longs », avec des dégâts individuels plus ou moins importants et les coûts sociaux qui en découlent (arrêts de travail, soins).
La vaccination est la clé de voûte de la sortie de la crise sanitaire, les données comparées sur les hospitalisations comme sur les décès entre vaccinés et non vaccinés en attestent. Cependant les vaccins existants – s’ils la réduisent – n’empêchent pas la contagiosité, ce qui implique l’articulation avec d’autres mesures (gestes barrière, télétravail, l’alternance pour éviter les concentrations dans les transports, etc.) tant que la vaccination n’est pas généralisée avec ce que cela signifie comme menaces d’encombrement hospitaliers.
La crise sanitaire est réelle, et comme pour chaque crise le système capitaliste profite des effets d’aubaine : aubaine économiques (« purge » au détriment de certains secteurs de l’économie et d’entreprise au profit de grandes firmes ; à commencer par les GAFAM, le CAC40, les laboratoires pharmaceutiques), aubaine politique avec notamment les techniques de contrôle de la population, et en France la manifestation monarchique/autoritaire que permettent les institutions de la 5e République.
Le néo-libéralisme a – outre ses dégâts économiques et sociaux (voir notamment la situation de l’hôpital, privatisations, démantèlement et sabotage des services publics) – engendré une haute dose d’incompétence dans le haut personnel administratif éduqué à une gestion libérale et bureaucratique, et dans le personnel politique, incapables d’anticipation, avec une gestion au jour le jour alors que les initiatives venues d’en bas, notamment dans le premier confinement (fabrication de masques, réseaux de solidairité, mise à l’écart dans les hôpitaux des « gestionnaires » pendant plusieurs semaines) attestaient d’autres possibles.
Les politiques gouvernementales apparaissent à juste titre contradictoires, avec des mensonges (cf. les déclarations sur les masques), des silences, des mesures prises sans concertation véritable avec les élus territoriaux, les syndicats, les associations, les professionnels. Le président- monarque décide tout seul en dernière instance sans même se préoccuper de la faisabilité desdites mesures. Là où il fallait faire preuve d’anticipation (que ce soit en juin 2020 ou au printemps avec l’apparition du variant delta) en appelant à la vigilance, préparant le service public de l’hôpital par des investissements, recrutements, etc. le gouvernement a fait comme si la crise était finie avant d’être pris de panique devant la réalité de l’épidémie.
Les grands médias ont relayé ces discours gouvernementaux en jouant sur la peur, l’angoisse. En effet l’anxiété sidère, le « spectacle » amène de l’audimat, et donc des ressources publicitaires. Quand le gouvernement décide de déconfiner, on peut voir du jour au lendemain ces médias ne parlant plus du virus mais des départs en vacances, de la reprise, etc.
La défiance s’est approfondie vis-à-vis du « politique », en tous cas des institutions et des partis, et s’est étendue à la science. Là encore, la logique médiatique est venue faire du débat et des controverses scientifiques qui ont leurs espaces dédiés (colloques, articles, revues) un spectacle avec ses pugilats entre « experts », d’où il ressort que « les avis sont partagés ». Nul doute que si la santé est une chose qui n’appartient pas qu’à la médecine, les éclairages, débats, informations devraient être menés publiquement et de manière sérieuse.
La gauche, le mouvement ouvrier se sont avérés assez largement paralysés dans cette crise, les alternatives possibles qui étaient développées dans des syndicats, partis, associations sont restées – dans le rapport de forces – plus ou moins confidentielles. Dès lors, une fois l’effet de sidération passé (le premier confinement qui a fait largement consensus comme réponse immédiate à l’urgence face au virus et à l’état catastrophique de la santé publique), la confusion qui règne au sommet a gagné une partie du mouvement populaire. Au pays de Pasteur, la montée des opinions anti-vaccins a été notable depuis le début 2020. La protestation légitime contre des mesures inadaptées (le masque en extérieur systématique, le pass-sanitaire contrôlable au quotidien en tous lieux) est gangrenée par les « antivax » au nom de la « liberté individuelle » de se vacciner ou non. Or, si les vaccins n’étaient pas sûrs, il faudrait en toute logique demander l’interdiction desdits vaccins. Cette « liberté individuelle » est brandie au sens libéral (« chacun fait ce qu’il veut ») là où il faut parler d’abord de libertés publiques, cadre d’exercice des libertés individuelles.
Aucune mesure restrictive ne peut être exclue par principe. Il n’y a pas de bonne ou mauvaise mesure en soi, le tout étant qu’elle soit adaptée à la situation donnée au moment T, prise de manière un tant soi peu débattue, collective, en s’assurant de sa faisabilité. Le pass n’est pas exactement comme un certificat de vaccination, qu’on montre une fois à l’inscription en crèche, à l’embauche dans certains secteurs, pour entrer dans certains pays. De plus, il pénalise aujourd’hui des populations qui n’ont pas eu accès au vaccin, et qui d’ailleurs pour beaucoup ne peuvent profiter du restaurant, de vacances, de loisirs du fait de leur situation économique. En revanche, les transports du quotidien demeurent bondés, à la fréquence réduite pendant les vacances.
La vaccination dans un seul pays, même si elle atteignait 100% n’empêcherait pas le virus de circuler. Le virus n’a ni frontière, ni nationalité. Or, le vaccin n’est pas accessible partout. Les inégalités entre pays riches et les autres, entre Nord et Sud , entre les anciennes métropoles et les ex-colonies sont encore une fois manifestes : état délabré des systèmes hospitaliers, vaccins « donnés » au compte-goutte, parfois inutilisables. La santé n’est pas une marchandise, elle est un bien commun de l’humanité. Dès lors, il faut lever les brevets, en finir avec le secret des contrats, qui, de surcroît, alimente les phantasmes complotistes.
S’il est juste de réclamer de l’Etat un certain nombre de moyens et de mesures, il faut que le mouvement social affirme son autonomie avec une politique sanitaire propre. Le mouvement ouvrier avait su mener des luttes contre l’alcoolisme, les maladies vénériennes, la tuberculose, pour des vaccinations obligatoires dans des secteurs professionnels (ex. égoutiers). Avec ses organisations autonomes, notamment les mutuelles, il avait pris en charge des campagnes d’information, la construction de sanatoriums, de dispensaires.
Mettre en place dans les entreprises avec les CSE, leurs CSST et les syndicats, en lien avec la médecine du travail, les services de santé au travail des campagnes d’information et de vaccination est possible. Il en va de même dans les quartiers et les villes avec les associations, les municipalités, les professionnels, dans les établissements scolaires et universitaires.
A l’échelle nationale, une coordination des organisations et organismes pourrait jouer un rôle d’expertise et d’information indépendante des pouvoirs publics et des industries pharmaceutiques. Il ne manque pas de chercheuses et chercheurs, de laboratoires scientifiques, universitaires, de personnels travaillant dans les grands laboratoires disponibles et désirant s’affranchir des intérêts économiques de ces entreprises. Une véritable éducation sanitaire, indispensable à une authentique démocratie sanitaire est d’actualité car, malheureusement, d’autres épidémies sont prévisible, effets des activités humaines ayant le profit comme objectif, et des changements climatiques.